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Le château de Bonaguil est un des derniers châteaux forts
construits. Il est bâti sur un éperon calcaire qui domine d'une
trentaine de mètres le confluent de deux étroites vallées, sur un
affluent de la Thèze, appelée de trois noms : le ruisseau de Caupenne3,
la Petite Thèze et ruisseau de Bonaguil. Il détient la particularité de
ne pas être sur une position stratégique : le château ne défend pas une
ville, ni le passage d'un fleuve, ni une vallée importante ou une route
commerciale.
Sa construction débute au XIIIe siècle, puis il est
entièrement repris à la fin du XVe siècle et au début du XVIe siècle par
le baron Bérenger de Roquefeuil qui lui ajoute tous les
perfectionnements défensifs du Moyen Âge finissant. Il intègre à partir
de 1480 les derniers perfectionnements de la défense au moyen de
l’artillerie tant pour utiliser celle-ci que pour s'en prémunir :
imposante barbacane couvrant l'accès au château, canonnières par
dizaines tant dans les tours que dans les courtines, chambres de tir
casematées (« voûtées ») à l'abri des boulets adverses et permettant des
feux bas et rasants, « moineau » casematé interdisant toute circulation
au fond du grand fossé, terrasses d'artillerie étagées au pied du corps
de place qui constituent autant d'enceintes successives à forcer,
aménagement à des fins défensives d'une grotte naturelle située sous
l'éperon rocheux.
À son achèvement vers 1510, il apparaît
cependant obsolète. En effet, à cette époque du début de la Renaissance,
les grandes familles nobles ainsi que le roi et ses proches commencent à
construire les premiers châteaux de la Loire et, dans tout le royaume,
de nombreuses forteresses médiévales de la petite et moyenne
aristocratie, même si elles conservent quelques dispositifs défensifs,
sont peu à peu transformées en résidences d'agrément par abattage d'une
partie des tours et des courtines afin de les ouvrir sur la lumière et
la campagne.
Hormis la perte de ses charpentes pendant la
Révolution française, le château de Bonaguil est aujourd'hui dans un bon
état de conservation. Il n'eut jamais à subir d'attaque et fut habité
jusqu'à la Révolution.
Origines
Le nom signifierait « Bonne
Aiguille » ou « Bonne Eau »4 et désigne le site défensif : un
promontoire rocheux et escarpé de calcaire urgonien, convenant
parfaitement à l’établissement d’un château fort. Ce site est préféré
aux éperons proches de plus grande altitude par la présence d'un point
d'eau. Il a été construit en hauteur pour apercevoir toute attaque.
Premier état
Le château d'après Viollet-le-Duc
Un
premier château de Bonaguil est construit après le milieu du XIIIe
siècle (entre 1259 et 1271 selon Jean Jacques Gardelle), sur un éperon
rocheux, probablement par Arnaud La Tour de Fumel. La seule entrée du
donjon, lui-même construit au-dessus d’une grotte naturelle, est une
porte à six mètres de hauteur, accessible à l’échelle.
La
première mention dans un texte date de 1271, dans une charte qui
répertorie les biens du roi de France Philippe III le Hardi. À cette
date, Bonaguil est une seigneurie vassale du fief de Tournon et les
principaux bâtiments du château sont un donjon de forme polygonale
allongée et un logis rectangulaire, situé à l'ouest du donjon au-delà
d'une étroite cour intérieure large d'une dizaine de mètres. La forme
particulièrement oblongue (3 fois plus long que large, ainsi que ses
extrémités effilées) du donjon a été strictement dictée par les
dimensions et la forme du support rocheux (calcaire campano-urgonien)
sur lequel il s'élève. La pointe nord du donjon, dont la maçonnerie
épaisse de plus de trois mètres forme un angle d'environ 65°, est
dirigée du côté probable de l'attaque : l'étroite crête située
immédiatement au nord de la forteresse.
Dans la cour du château,
l’élargissement et le surcreusement d’une diaclase (faille verticale
naturelle dans la roche calcaire) a permis de forer un puits profond de
48 m. pour un diamètre de 2 m. Dès le début de son existence, le château
est donc approvisionné en eau.
Les seigneurs du lieu combattent
dans le parti du roi d’Angleterre pendant la guerre de Cent Ans. Le
château est pris plusieurs fois, incendié et abandonné, bien que
toujours propriété de la famille de Fumel.
Le 11 novembre 1380,
Jean de Fumel-Pujols, baron de Blanquefort et propriétaire du château,
épouse l’héritière de la puissante famille languedocienne des Roquefeuil
(cf.Maison de Roquefeuil-Blanquefort), Jeanne Catherine de Roquefeuil,
et abandonne son nom pour celui -plus prestigieux- de son épouse. Leur
fils Antoine hérite des importants biens des deux familles. Le fils de
ce dernier, Jean de Roquefeuil épouse Isabeau de Peyre. Le couple aura
neuf enfants, dont Bérenger qui naît en 1448 au château de Flaugnac.
Jean et son épouse résident épisodiquement à Bonaguil (à l'instar de
tous les nobles fortunés qui possédaient plusieurs châteaux) ce qui
l'incitera à réaliser quelques aménagements dans l'austère forteresse de
ses ancêtres maternels.
Plan du château réalisé par Viollet-le-Duc
Le nord est en bas
Les aménagements de Jean de Roquefeuil
Jean
de Roquefeuil, qui a envoyé son fils Antoine participer à la guerre de
la Ligue du Bien public, contre le roi, procède à quelques aménagements,
autant défensifs que de confort :
les murs du logis à l'ouest de la cour intérieure sont surélevés (en E sur le plan) afin d'ajouter un étage supplémentaire.
Un escalier à vis est installé dans une nouvelle tourelle "hors
d’œuvre" accolée contre le flanc ouest du donjon, ce qui augmente
l’espace disponible à l'intérieur de celui-ci. L'accès au donjon
s'effectue désormais ainsi : partant de la cour, une volée d'escalier
rectiligne d'une bonne vingtaine de marches mène à une étroite porte
ouverte à la base de la tourelle d'escalier. Cette porte est défendue
par un pont-levis piétonnier et quelques petites canonnières à tir
plongeant.
Des quatre fils -sur neuf enfants- de Jean, c’est le
troisième, Bérenger, surnommé 'Bringon', qui survit aux autres et hérite
en 1483, de tous les biens de ses parents. Auparavant, Bérenger a
fréquenté la cour du roi de France Louis XI où son père l'avait
probablement fait entrer comme page. En 1477, il épouse Anne du Tournel
au Château Royal d'Amboise. Il appartient sans doute au cercle des
personnages de la cour assez proches de Louis XI car ce dernier, réputé
pour sa pingrerie, lui octroie néanmoins une confortable pension. Revenu
de la cour après la mort de son père, Bérenger de Roquefeuil vivra
quelques années entre son château de Castelnau-Montratier à une
trentaine de kilomètres de là et un de ses autres châteaux, Blanquefort.
Il possède désormais en tout une vingtaine de châteaux et près de
trente baronnies (il en fait d'ailleurs état quelques années plus tard
dans une lettre adressés à Louis XII) Et c'est vers 1495 que Bérenger va
s'installer à Bonaguil dont il fait sa résidence principale, non sans y
avoir engagé, une dizaine d'années auparavant, d'importants travaux qui
vont transformer, agrandir et renforcer considérablement la vieille
forteresse de ses parents.
Les renforcements défensifs de Bérenger de Roquefeuil
Les
considérables travaux de défense du château trouvent peut-être leur
source dans les démêlés du seigneur de Bonaguil avec le roi Charles
VIII, qui le condamne pour un violent différend avec ses vassaux de
Castelnau-Montratier. Ainsi s'esquisse un premier portrait psychologique
de Bérenger : c'est un puissant et riche baron, jaloux de ses
prérogatives seigneuriales héritées du temps de ses ancêtres, de
caractère peu facile, fier à l'excès (il a écrit "ne pas craindre les
troupes du roi de France si l'envie venait à celui-ci de venir mettre le
siège devant Bonaguil").[réf. nécessaire]
Bérenger de Roquefeuil
financera ces importants travaux, qui dureront trente ans, grâce à la
fortune des Roquefeuil, qui possèdent des terres de la Gironde au Golfe
du Lion.
Première enceinte
Castell de Bonaguil.JPG
Le
principal danger à la fin du XVe siècle vient des progrès de
l’artillerie. Celle-ci, née depuis plus d'un siècle, n'a cessé de
s'améliorer, tant en puissance, qu'en précision et qu'en régularité de
tir. Pour s'en prémunir, il faut donc tenir le plus éloignés possibles
les canons de l’assaillant, tenant compte que ceux-ci, en cette fin du
XVe siècle, doivent être, pour être efficaces, mis en batterie à une
distance comprise entre 50 et 100 m. des murailles à détruire. Au-delà,
leur tir perd de sa puissance et, plus près, les servants de pièces
s'exposent dangereusement à la riposte des défenseurs. Tenant compte de
ces impératifs techniques, une enceinte externe, d’une longueur de 350
m, est ajoutée au château. Elle est constituée de courtines basses
remparées (retenant à leur revers une masse de terre dont la partie
supérieure forme une terrasse défensive) Ce système appelé également
fausse braie) permet d'amortir partiellement, grâce aux importantes
masses de terre, les vibrations destructrices des impacts de boulets
contre les maçonneries. Cette enceinte extérieure de Bonaguil est
renforcée de tours basses qui ne dépassent pas le niveau des
fausses-braies et équipée de canonnières à tir rasant, ce qui est la
deuxième innovation de cette reconstruction : la prévision de l’emploi
massif d’artillerie pour la défense du château, avec un total de 104
embrasures aménagées pour les bouches à feu.
On a donc une prise
en compte des derniers progrès de l’armement : d'une part on repousse le
tir de l’assaillant en obligeant ce dernier à positionner ses canons
bien plus loin qu'il ne le souhaiterait et, d'autre part, on lui rend
difficile l’approche de son infanterie à cause des multiples canonnières
tirant quasiment au ras du sol et tous azimuts. Enfin, les canons de
fort calibre de la défense sont installés de préférence en hauteur, soit
sur les terrasses des fausses-braies entourant le château, soit dans
les casemates situées à mi-hauteur des tours, ceci afin de battre au
loin les positions de l'assaillant. Bonaguil offre donc des niveaux de
défense étagés en hauteur, technique qui perdurera plusieurs siècles :
les tirs lointains (tirs courbes, dits "paraboliques") sont effectués à
partir des parties hautes de la forteresse, les tirs d'interdiction de
l'approche (tirs tendus et rasants) opérés à partir des parties basses.
Ces multiples possibilités d'utilisation de l'artillerie à des fins
défensives sont renforcées par l'usage des armes portatives
individuelles, tant à jet (arcs et arbalètes qui servirent jusqu'au XVIe
siècle) qu'à feu (arquebuses), toutes parfaitement utilisables à partir
des anciennes archères des XIIIe et XIVe siècles siècles dont nombre
sont conservées.
L’éperon sur lequel est établi le château est
isolé du plateau par un large et profond fossé creusé dans le roc. Une
imposante barbacane est établie en ouvrage avancé au-delà du fossé, sur
le rebord extérieur de celui-ci, appelé "contrescarpe". Ce colossal
ouvrage contrôle l'unique accès à la forteresse. Il peut aussi
fonctionner comme un sas en cas de période d’insécurité : on laisse
pénétrer dans la barbacane les entrants suspects, puis on relève le
pont-levis extérieur derrière eux. Puis après contrôle de leur identité,
on abaisse pour eux l'un des deux ponts-levis qui donnent accès au
château. La forme arrondie de cette barbacane, ainsi que ses murs épais
de quatre mètres, font office de bouclier protecteur pour la face nord
du château, la plus vulnérable car légèrement dominée par la crête
située au nord. Cet ouvrage extérieur est ceint de son propre fossé,
large de quatre mètres environ et profond de cinq. Mais le rôle de cette
barbacane n'est pas que passif : si l'épaisseur de ses murs lui confère
un rôle de très solide bouclier, elle se défend aussi de façon active
grâce à de multiples canonnières interdisant à l'ennemi d'en approcher.
Le plan de tir de ces embrasures ne laisse d'ailleurs subsister aucun
angle mort. Sur le flanc est de la barbacane, du côté de sa porte, deux
tours permettent d'effectuer des tirs de flanquement tandis que sur son
flanc ouest, la fonction de flanquement est dévolue à une aile saillante
de la muraille. La porte de la barbacane est de plus située dans le
flanc de celle-ci qui domine l'abrupt, à l'est. Un pont dormant, non
rectiligne car formant un coude de quatre-vingt-dix degrés vers la
droite, franchit le fossé de la barbacane et s'achève, devant la
muraille de celle-ci, par un pont-levis. Le virage formé ce pont fixe
rendait très difficile, voire impossible, l'utilisation d'un bélier aux
fins de défoncer la porte. De plus, la position de celle-ci dans un
flanc de la barbacane non visible ("défilé") aux vues de l'assaillant,
empêchait celui-ci de la détruire au canon faute de pouvoir y parvenir
au bélier. La barbacane est reliée au château par deux ponts dormants
qui franchissent le grand fossé. Ces ponts sont posés sur des piles
hautes de dix mètres (soit la profondeur du fossé) Le premier pont,
large de 2,50 mètres environ, mène au cœur du château résidentiel.
L'autre, parallèle, plus étroit, est situé à une dizaine de mètres à sa
gauche. Il donne accès à une basse-cour et à des bâtiments de servitude
situés au pied est du donjon, légèrement en contrebas du château. Ces
deux ponts jetés sur le grand fossé s'achèvent par une coupure large de
quatre mètres qui ne peut être franchie qu'en abaissant un pont-levis.
Le pont-levis menant au château résidentiel est double : un petit, assez
étroit, de la largeur d'une passerelle, dessert une porte piétonnière
tandis que le pont-levis le plus large dessert une porte charretière.
Pour l'accès aux communs, un seul pont relevable, de largeur
intermédiaire.
Toujours dans ce but de ne laisser subsister aucun
emplacement à l'abri des tirs de la défense, un moineau est aménagé
dans le fond du grand fossé, au pied de l'escarpe rocheuse. Ce petit
ouvrage est une casemate basse couverte d'un toit épais en dalles et
moellons et qui repose sur une solide voûte
casemate basse
. On ne peut y accéder à ce moineau que par une grotte naturelle
grotte naturelle
prolongée
en couloir qui, s'ouvrant dans l'escarpement rocheux au sud du château,
passe de part en part sous celui-ci. Ce moineau est un ouvrage
militaire typique de la seconde partie du XVe siècle. Situé en fond de
fossé, armé de cinq canonnières, il est totalement protégé des tirs de
canon de l'assaillant et permet d'effectuer des tirs rasants dans le
fossé, interdisant à l'assaillant qui aurait réussit à y descendre à
utiliser le fond du fossé comme voie de progression (Les moineaux ont
subsisté, sous l'appellation de "caponnières" et dans une variante
modernisée, jusque dans la fortification du début du XXe siècle).
D'autres canonnières, situées en partie basse des tours, viennent
renforcer l'action défensive du moineau. Un singulier poste de tir pour
défendre le fossé est également aménagé dans la pile du pont menant à la
basse-cour. Cette pile en maçonnerie, haute d'une dizaine de mètres, de
section carrée d'environ deux mètres sur deux, est creuse sur les huit
dixièmes de sa hauteur. En haut de la pile et au beau milieu du passage,
une trappe recouvre un trou d'homme dans lequel on descend au moyen
d'une échelle. Au bas de ce puits étroit et profond de plus huit mètres,
des meurtrières percées dans les parois de la pile, permettent de
donner des tirs rasant directement dans le fossé. Mais étant donné
l'exibition de ce petit poste de tir, un seul homme peut le servir et
uniquement muni d'une arme individuelle (arquebuse ou arbalète, cette
dernière ayant été en usage jusqu'au milieu du XVIe siècle).
Enfin,
des boulevards terrassés sont aménagés sur les flancs est, sud et ouest
du château. Ces boulevards sont renforcés par des tours basses
casematées. Le boulevard arrondi qui contourne le pied de l'angle
sud-est du château renferme un long couloir semi-circulaire qui dessert
huit canonnières qui prennent les pentes est, sud et nord sous leurs
feux. Ce couloir-casemate est couvert d'une remarquable voûte. On y
descend par une rampe située à l'une de ses extrémités. Cette pente
aménagée permet ainsi un accès aisé pour le portage de canons de petit
calibre. À l'autre extrémité, un escalier à vis remonte près de l'entrée
de la grotte-couloir menant au moineau du grand fossé nord. Le
boulevard implanté à l'angle sud-ouest du château communique avec
l'extérieur au moyen d'un passage en chicane ménagé au cœur une tourelle
basse couverte d'un toit de lauzes. D'apparence anodine, banale,
l'accès réalisé dans cette tourelle est en réalité un redoutable piège :
deux portes épaisses à forcer, l'une pour pénétrer dans la tourelle,
l'autre pour pouvoir en ressortir. Entre ces deux fermetures : un étroit
couloir en zig-zag interrompu par une porte intermédiaire, elle-même
prise sous les tirs d'enfilade d'une meurtrière intérieure.
Dimensions de quelques unes des 13 tours Nom de la tour Diamètre Hauteur Épaisseur des murs
Donjon
Grosse tour 14 m 35 m 8 m
Tour rouge
Deuxième système de défense
Les
fausses-braies/boulevards et la barbacane ne sont destinées qu’à
éloigner l'assaillant du cœur du château, qui constitue la partie
résidentielle. Celle-ci est également renforcée. Six tours sont
construites, quatre tours circulaires d’angle et deux tours de milieu de
courtine, une carrée à l’ouest, et une ronde au sud (d’importance
secondaire, d’autant qu’elle est actuellement prise dans des
appartements construits au XVIIIe siècle). Les tours sont à peine
engagées, donc a contrario très saillantes par rapport à l'enceinte, ce
qui permet un meilleur flanquement de celle-ci. La plus intéressante de
ces tours construites par Béranger de Roquefeuil se situe à l'angle
nord-ouest du château, à l'extrémité du grand fossé de l'entrée. Il
s'agit d'un énorme cylindre de plus de quatorze mètres de diamètre, haut
de trente et dont les murs dépassent les quatre mètres d'épaisseur à la
base. Elle contient sept étages dont les trois plus bas desservent des
canonnières, tandis que les quatre étages supérieurs, non dévolus à la
défense, s'éclairent par de magnifiques fenêtres à croisées de meneaux.
Le sommet de cette remarquable tour (l'une des plus belles tours
médiévales de France) est couronné d'un chemin de ronde avec mâchicoulis
porté par des corbeaux de type breton (en pyramides inversées, avec des
quatre ou cinq ressauts.
Ces hautes tours servent, comme dans le
château médiéval primitif, à protéger les murailles grâce aux avancées
qu’elles constituent.
Les vicissitudes du château du XVIe siècle au XVIIIe siècle
Quand
Bérenger meurt en 1530 à l'âge exceptionnel pour l'époque de 82 ans, le
château de Bonaguil, avec ses hautes tours et murailles, bien
qu'épaisses, n’est déjà plus adapté aux techniques militaires de
l'époque. Dans l'intervalle, les canons ont fait de considérables
progrès : ils peuvent tirer de plus en plus loin et avec plus en plus de
force. On commence dès lors à construire des forts enterrés et à peine
dix ans plus tard, les premières fortifications bastionnées vont voir le
jour en Italie. Malgré ces faiblesses, Bonaguil demeure pour l'époque
une forteresse imposante qui ne résisterait certes pas bien longtemps à
une armée bien organisée et équipée, mais peut tenir longtemps en
respect une troupe peu nombreuse et mal aguerrie.
Charles, le
fils de Béranger de Roquefeuil dilapide (semble-t-il pour sa belle
épouse Blanche de Lettes de Montpezat) la fortune de son père, et ses
fils Honorat et Antoine héritent d’une fortune bien amoindrie. Au cours
des guerres de Religion, les deux frères combattent dans les camps
opposés, et le château est pris en 1563. Une première restauration a
lieu en 1572. Endetté, Antoine doit remettre au sire de Pardhaillan la
forteresse en 1618, avant de pouvoir la racheter quelques années plus
tard.
Son fils Antoine-Alexandre est marquis, mais laisse à sa
seule fille Marie-Gilberte, un château en mauvais état et des coffres
vides. Mariée dès la mort de son père le 9 juillet 1639 (à treize ans)
au marquis de Coligny-Saligny, lieutenant des gendarmes de la Reine,
elle se consacre au relèvement et à l’entretien du château. Elle se
remarie en 1655 avec Claude-Yves de Tourzel, marquis d’Allègre, dont
elle a une fille qui épouse Seignelay, ministre de la famille de
Colbert.
François de Roquefeuil, parent éloigné qui avait
quelques droits sur le château, en prend possession en 1656, après avoir
enlevé de force le château de Flaugnac, les conserve près d’un an, et
n’abandonne Bonaguil que pillé. Marie-Gilberte réside à Paris les
dernières années de sa vie, et laisse à l’abandon le château de
Bonaguil, jusqu’à sa mort en 1699. Il passe ensuite aux Montpeyroux
(François-Gaspard de Montpeyroux, qui, soldat, n’y habita presque
jamais) puis à sa sœur qui le vend en 1719 à Jean-Antoine de
Pechpeyrou-Beaucaire. Le fils de celui-ci vend le château à Marguerite
de Fumel, veuve d’Emmanuel de Giversac, en 1761, qui y fait quelques
travaux de confort.
Les constructions d’agrément au XVIIIe siècle
Marguerite
de Fumel séjourne en effet régulièrement au château de Bonaguil. Elle
fait donc aménager le château, notamment dans le logis P du plan. À
cette époque, la fausse braie à l’ouest du château est agrandie et
aménagée en une grande terrasse et devient un lieu de promenade et
d’agrément. De nouveaux appartements sont construits au sud, en dehors
de l’enceinte intérieure, et bénéficiant ainsi d’une meilleure
exposition. La châtelaine donne des fêtes. Les sept ponts-levis sont
transformés en ponts-dormants. Une partie des remparts est abattue afin
de donner une vue sur la vallée.
La Révolution et les restaurations
C’est
le neveu de Marguerite de Fumel, Joseph-Louis de Fumel qui en hérite en
1788. Il émigre dès octobre 1789, et le château est adjugé comme bien
de la Nation. Tout le mobilier est dispersé, les toits, planchers et
boiseries démontés en 1794. Lorsqu’après Thermidor, les Fumel récupèrent
le château, ils ne l’habitent pas, et le vendent.
Il passe de
mains en mains jusqu’à son achat en 1860 par la commune de Fumel, qui
obtient le classement comme Monument historique (1862). La commune fait
procéder à quelques travaux de restauration par B. Cavailler en 1868 et
par l’architecte de l’arrondissement A. Gilles en 1876. L’architecte des
Monuments historiques restaure le donjon de 1882 à 1886. D’autres
réparations ponctuelles ont lieu de 1898 à 1900, dont la couverture en
lauzes de la guette du donjon qui est refaite en 1900 ; d’autres travaux
ont lieu en 1948-1950, 1977 et 1985. Une dérestauration du donjon est
effectuée en 1956. En 1956 Max Pons avec l'aide de Fernande Costes
reprennent le château en main. Ils font passer le château de 3 000
visiteurs en 1956 à 70 000 visiteurs par an en 1992.
Voir aussi
Articles connexes
Liste des châteaux d'Aquitaine
Liens externes
Site de l'Association Roquefeuil-Blanquefort
Sur les autres projets Wikimedia :
Château de Bonaguil, sur Wikimedia Commons
À lire
Antoine Régo, Yannick Zaballos et Christelle Loubriat, Bonaguil, dernier des grands châteaux forts, Éditions Fragile, 2005.
Fernande Costes, Bonaguil ou le château fou, Seuil, 1976.
Henri-Paul Eydoux, Châteaux Fantastiques, Brochée, 1992.
Michel Coste, Bonaguil, les clés du château, Librairie du château, 2000.
Max Pons et Pascal Moulin, "Visiter Bonaguil",Sud Ouest, 2000
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