| Notes: Front hinge open. UnPlus... Raphael Rubinstein L'autre jour, j'ai eu une revelation concernant I'oeuvre de Noel Dolla. Pour expliquer en quoi elle consistait exactement, il me faut d'abord preparer le terrain ; je demande done au lecteur de s'armer d'un peu de patience. CetteTequete me rap-pelle quelques lignes d'un des textes tres eloquents de Dolla, dans lequel il attaque les critiques, commissaires d'expositions et? mediateurs de I'art? qui croient pouvoir comprendre un tableau en un clin d'ceil, et estiment superflu I'examen attentif et prolonge d'une ceuvre d'art. Dolla y fustige ? le coup d'oeil rapide de ceux qui s'ima-ginent avoir tout compris en quelques secondes?1. Comme beaucoup d'autres ecrits de Dolla, ce commentaire nous touche au vif. Qui d'entre nous n'a jamais regarde une peinture pendant quelques instants, en s'ima-ginant avoir tout compris ? Je suis parfaitement conscient que, trop souvent, il m'est arrive de faire un tour dans une galerie en jetant un regard desabuse sur les ceuvres exposees, ou de demander a un artiste de me ? montrer un autre tableau ? sans avoir fait I'effort de regarder vraiment celui qui etait accroche au mur. II existe cependant un artiste dont je n'ai jamais pu juger le travail avec une telle precipitation : Noel Dolla. Quelle que soit la piece de Dolla que je regarde, j'ai toujours I'impression qu'une partie importante de la signification n'est pas revelee, du moins pas imme-diatement, et qu'il me faudra du temps et un veritable effort de reflexion pour y acceder. II ne s'agit pas d'une obscurite deliberee de la part de I'artiste, et pas davan-tage de references personnelles dont il faudrait trouver la clef - Ton ne comprend pas les oeuvres de Dolla en consultant des citations d'historiens de I'art, ni en dechif-frant quelque langage esoterique. C'est du au fait que meme la plus modeste de ses ceuvres, un des petits tondos de la serie des Petits Ronds de La Havana ou un pola-ro'id de I'artiste coiffe d'une sculpture de la serie des Hot /ce Cap, exige que le regar-deur remette de I'ordre dans ses idees, et qu'il interroge I'objet par des moyens a la fois rationnels et instinctifs. Et pourtant - pour aborder un autre aspect essentiel de I'ceuvre bien plus tot que je ne I'avais prevu, mais qu'importe ! - bien que la comprehension ?totale? exige sans doute du temps, quelque chose se produit immediatement, ?en quelques secondes?, face a pratiquement n'importe laquelle de ses oeuvres. En depit de ses profcj^des reflexions conceptuelles sur I'art et de sa quete obstinee des moyens de se distancier des notions conventionnelles de la ? presence ? en peinture, Dolla reussit toujours a integrer dans ses oeuvres une trace du travail humain et un enon-ce visuel seduisant. Que ce soit dans des oeuvres anciennes telles que les Structures etendoir de 1967 ou les Cro/x du milieu des annees soixante-dix, dans Les trois du cap, les Ripolins et au-dela, Dolla ne manque jamais de mettre en lumiere les conditions materielles de la creation, tout en presentant des objets formellement impre-\/kihlp<; mi'il sprait nourtant imnossible d'attribuer a un autre artiste. Malare tout 157 pages. |