'Je n'écris pas pour une minorité choisie qui ne m'importe guère ni pour cette entité platonique tellement adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois à aucune de ces deux abstractions chères au démagogue. J'écris pour moi pour mes amis et pour atténuer le cours du temps.' Sans doute Borges considérait-il les lecteurs de la Pléiade comme des amis inconnus : il envisageait avec bonheur la perspective d'entrer dans cette 'Bibliothèque'. Non content d'autoriser cette édition il a pris part à son élaboration jusqu'à l'extrême fin de sa vie : il a guidé le travail de traduction et d'annotation en livrant avec générosité ses réflexions sur son oeuvre et en indiquant quels textes oubliés il acceptait que l'on exhumât pour l'occasion.
On parlerait volontiers d'édition définitive si Borges n'avait écrit (dans sa préface à la traduction en vers espagnol du Cimetière marin de Valéry) que 'l'idée de texte définitif ne relève que de la religion ou de la fatigue'...