HUGO, Victor (1802-1885)
Lettre
autographe signée « V. » à Émile Allix
H[auteville] H[house], 25 juillet [1862], 2 pp. petit in-24° (4,3 x 6,8 cm) sur
papier vergé bleu,
Enveloppe autographe jointe (déchirure, voir scan)
Légère trace de pliure oblique sans importance sur la deuxième page
[Timbre sec :] S. Barset / June / 25 / High Street / Guernsey
[Cachet postal :] 28 Jul[y] [18]62 / Ang[leterre] – Calais
Lettre
«
miniature » inédite à son médecin personnel, annonçant
son départ pour la Belgique après l’épuisant travail de rédaction des Misérables
« Merci,
cher Monsieur Émile. Vous avez le dévouement le plus charmant du monde et vous entrez en
fonctions avec tout l’esprit possible et une grâce parfaite.
Votre lettre est une page tout étincelante. – Voici, imprimées, deux lettres
qui vous intéresseront, si vous connaissez quelque journal qui trouve bon de
les reproduire, faites. Je vais voir mon Charles dans quelques jours. Ce
sera une joie profonde, et je la mérite un peu après ce lourd labeur. Quel
dommage que vous ne soyez pas de cette clef des champs là ! – Est-ce que vous
voudrez jeter à la poste ces trois billets. Je fais mon sac de nuit, et je vous
serre les deux mains
V. »
Une lettre à
Paul Meurice, envoyée la veille, permet de connaître en détails le périple que Victor Hugo s’apprête à
entreprendre : « Nous partirons
lundi 28 (avec M. Lacroix) [l’éditeur des Misérables], nous passerons à Londres
la journée de mardi. Mercredi 29 nous serons à Bruxelles (par Ostende), jeudi
30 à Liège (puisque Liège vous plaît). Tâchez donc d’y
arriver, vous et Charles, le 31 juillet », puis d’ajouter en fin de lettre, anticipant semble-t-il les recommandations
de son médecin :
« Pour modérer
la pluie de lettres pendant mon absence, voudrez-vous faire publier dans Le
Siècle ou La Presse quelque chose comme ceci : “Sur l’avis des
médecins qui lui ont conseillé le changement d’air après le grand travail des Misérables
M. Victor Hugo a quitté Guernesey pour un voyage de quelques semaines” »
Émile Allix
(1836-1911) est un docteur en médecine français, spécialisé en pédiatrie. C’est lors de vacances
passées à Jersey que le jeune étudiant en médecine (alors âgé de 19 ans)
fait connaissance de l’écrivain par le biais de son frère Jules et sa sœur Augustine,
proches du cercle Hugo. Ses convictions républicaines, son opposition au régime
de Napoléon III, sa gentillesse et sa nature très douce furent autant
d’arguments qui permirent au médecin de sceller le début d’un indéfectible
amitié avec l’écrivain. C’est Allix qui, en 1868, assistera Adèle Hugo, très
malade, dans ses derniers instants. Intime de
Victor Hugo et de sa famille, il
sera le fidèle de tous les instants, comme un autre fils. Avec ses confrères
Alfred Vulpian et Germain Sée, il signe les derniers certificats qui précèdent
la constatation du décès de Victor Hugo, le 22 mai 1885.
Quand Victor
Hugo signait de la seule initiale de son prénom, cela signifiait avant tout une
très grande proximité avec son correspondant (habituellement réservée à son
cercle le plus proche). Le regret exprimé ici par l’écrivain de ne pouvoir
retrouver son ami médecin pour son périple belge témoigne d’autant plus des
liens qui les unissaient.
Les lettres de
Victor Hugo d’un format singulièrement si petit sont très rares
Provenance :
Collection particulière